Il a fallu que la situation empire pour que le gouvernement, longtemps silencieux face aux difficultés accumulées par Atos depuis près de deux ans, ce qui lui a valu de nombreuses critiques de l’opposition, prenne le dossier à bras-le-corps.
Alors que le groupe d’informatique doit trouver, d’ici au mois d’août, une solution à propos de son endettement de 5 milliards d’euros, le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, a annoncé, dimanche 28 avril, sur LCI, avoir « déposé ce week-end », par l’intermédiaire de l’Agence des participations de l’Etat, « une lettre d’intention en vue d’acquérir toutes les activités souveraines d’Atos ». « Le groupe accueille avec satisfaction cette lettre d’intention qui protégerait les impératifs stratégiques de souveraineté de l’État français », a réagi Atos le 29 avril.
Cette intention d’achat va un cran plus loin que l’action de préférence (golden share) négociée avec Atos depuis le 9 avril et qui vise à donner à l’Etat certains pouvoirs sur Bull SA, la société regroupant une partie des activités sensibles du groupe. « La golden share, qui devrait être finalisée très prochainement, était un premier pas pour manifester nos objectifs de souveraineté », indique le cabinet du ministre de l’économie. En devenant actionnaire, Bercy veut s’assurer encore plus de contrôle. « C’est le rôle de l’Etat de défendre les intérêts stratégiques d’Atos et d’éviter que des technologies qui sont sensibles, décisives en matière de supercalculateurs ou en matière de défense puissent à n’importe quel moment dépendre d’intérêts étrangers », a justifié M. Le Maire.
L’intention d’achat vise trois activités : les ordinateurs de haute performance (supercalculateurs) qui servent notamment à la simulation nucléaire ; les systèmes critiques (« mission critical systems »), principalement utilisés par les armées, comme le C4I (« command, control, communications, computers and intelligence ») qui fournit à la chaîne de commandement une carte du champ de bataille en temps réel, ou comme le module de sécurisation des communications du Rafale ; et, enfin, les produits de cybersécurité (cryptologie, contrôle d’accès…).
Ces trois activités représentent un chiffre d’affaires de l’ordre de 900 millions d’euros, soit un peu moins de 10 % des revenus totaux d’Atos. Elles emploient environ 4 000 salariés, dont la très grande majorité en France. Selon le groupe, l’intention de l’Etat valorise ces activités entre 700 millions et un milliard d’euros.
Coup de pression sur les industriels français
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