La découverte, fin octobre 2023, d’étoiles de David peintes sur les murs parisiens et de certaines villes de banlieue, suivie de l’interpellation d’un couple de Moldaves pris en flagrant délit, avait permis d’établir une tentative de manipulation de l’opinion française sur fond de guerre entre le Hamas palestinien et Israël. Identifié, le commanditaire, Anatoli Prizenko, un autre Moldave basé à Chisinau, la capitale du pays, avait assuré à plusieurs médias français, sans convaincre, que l’intention était de sensibiliser la France aux dangers de l’antisémitisme.
Une note de synthèse de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), transmise au ministère des affaires étrangères, dont Le Monde a eu connaissance, indique que cette opération « étoiles de David » était pilotée par « le 5e service [département] du FSB », chargé des opérations internationales au sein des services russes de sécurité. Une campagne de désinformation qui s’est révélée n’être, en réalité, qu’un des volets d’une opération d’ingérence plus vaste menée dans plusieurs pays européens et en Moldavie.
L’enquête française débute dans la nuit du 26 octobre 2023 lorsque deux personnes sont arrêtées en train de taguer des étoiles David sur les murs. Il s’agit d’un couple de Moldaves dont les auditions permettent d’apprendre qu’ils ont été rémunérés entre 300 et 500 euros, qu’on leur a payé leur billet d’avion de Chisinau à Beauvais et qu’on leur a fourni des téléphones. Un troisième homme présent sur place leur a procuré des pochoirs et des bombes de peinture. C’est lui qui a pris les photos des étoiles pour les diffuser sur les réseaux sociaux. Il ne sera pas inquiété. Les enquêteurs s’aperçoivent qu’une deuxième équipe est parvenue à s’enfuir.
« Influenceur » efficace
Tous ont quitté la France sans encombre et sont retournés en Transnistrie, région séparatiste moldave prorusse. Les investigations de la DGSI ont permis de retracer la présence du même couple de Moldaves, en France, entre les 25 et 30 septembre 2023, afin de participer à des distributions de tracts « Stop-NATO » (l’OTAN). Ils y ajoutèrent des tracts anti-immigration. Interrogé, le ministère de l’intérieur français assure ne pas avoir eu, alors, connaissance de ces agissements.
Le commanditaire, M. Prizenko, est vite identifié. Les services français vont parvenir à établir le lien entre cet homme et le « 5e service du FSB » dirigé par Sergueï Besseda. Ce dernier, selon un haut diplomate proche du dossier, n’aurait pas été sanctionné après l’échec de la première phase de l’invasion russe en Ukraine, en février 2022, comme cela a pu être avancé en Russie : il serait resté en fonctions.
Il vous reste 51.93% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.