C’est, en théorie, la fin d’un psychodrame qui a beaucoup occupé la sphère européenne depuis cet été. Jeudi 9 novembre, les Etats membres et le Parlement européen se sont entendus sur un compromis qui va permettre à l’Union européenne (UE) de se doter d’une loi sur la restauration de la nature, censée transcrire dans le droit communautaire l’accord de Montréal sur la biodiversité et la nécessité de restaurer 30 % des surfaces terrestres et marines dégradées d’ici à 2030, puis 60 % d’ici à 2040 et 90 % d’ici à 2050.
La ministre pour la transition écologique espagnole, Teresa Ribera Rodriguez, dont le pays assure la présidence tournante du Conseil de l’UE, s’est dite « fière » de la loi, « la première en son genre ». « Elle nous aidera à reconstruire des niveaux sains de biodiversité et à préserver la nature pour les générations futures, tout en combattant le changement climatique », a-t-elle affirmé. Selon des données communautaires, plus de 80 % des habitats naturels sont dans un état de conservation « mauvais ou médiocre » (tourbières, dunes, prairies particulièrement), et jusqu’à 70 % des sols sont en mauvaise santé.
« Aujourd’hui, il n’y a aucune gouvernance de la biodiversité à l’échelle du continent. Le concept juridique de restauration de la nature n’existe pas. C’est donc une étape significative qui vient d’être franchie », commente pour sa part Pascal Canfin, président de la commission environnement du Parlement européen.
Obligations de moyens, pas de résultat
Si le compromis arrêté jeudi soir ne permet pas d’assurer que les Vingt-Sept atteindront cet objectif – seules des obligations de moyens, pas de résultat, y sont inscrites –, il donne néanmoins aux Etats membres une direction dont la droite européenne du Parti populaire européen (PPE) ainsi que l’extrême droite ne voulaient pas entendre parler au début de l’été.
Manfred Weber, le président du PPE, et ses alliés populistes et nationalistes exigeaient en effet le retrait pur et simple de ce texte, dont ils affirmaient qu’il mettrait en danger la sécurité alimentaire de l’Union européenne (UE) et compromettrait le développement des énergies renouvelables. A l’approche des élections européennes, prévues en juin 2024, ils voulaient faire de la loi sur la restauration de la nature l’emblème de leur bataille pour mettre un point d’arrêt au Green Deal européen.
Leur tentative a partiellement échoué. Au terme d’une bataille homérique au Parlement européen, les eurodéputés ont finalement adopté, le 12 juillet, un texte largement vidé de sa substance mais qui avait le mérite d’exister, et dont l’adoption représentait de ce seul fait une victoire politique. Même si les Etats membres avaient également réduit l’ambition du projet de loi proposé par la Commission, les négociations qui ont suivi entre les deux colégislateurs n’ont pas été simples. « Nous avons eu avec le PPE une discussion plus rationnelle que celle de juillet », affirme néanmoins Pascal Canfin.
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