Dans quelle monnaie est-il pertinent de gérer son épargne ? La question posée par Radio Mitre au candidat ultralibéral Javier Milei, lundi 9 octobre, a marqué le début d’un affolement cambiaire et d’une petite tempête politique. « Jamais en pesos, jamais en pesos ! (…) Il a moins de valeur que l’excrément, ce déchet ne sert même pas à fabriquer de l’engrais », a rétorqué le favori de l’élection présidentielle du 22 octobre, dans le langage fleuri dont il est coutumier.
Dans la foulée, la monnaie nationale a dévissé. Sur le marché parallèle, elle a dépassé le seuil symbolique de 1 dollar pour 1 000 pesos, contre 880 pesos auparavant. Le marché officiel de change (1 dollar pour 365 pesos au même moment) reste contrôlé par l’Etat, par le biais d’une série de mécanismes. Une dévaluation de l’ordre de 18 % avait déjà été enclenchée à la mi-août. Mais le marché parallèle est très observé, car il sert de thermomètre et d’espace d’échange à la majorité des acteurs de l’économie, notamment aux épargnants.
Nombre d’entre eux ont été convaincus, après ces déclarations, de retirer les pesos de leur compte en banque – parfois thésaurisés sur un livret avec intérêts – pour les échanger contre des dollars. Le 10 octobre, en pleine nervosité cambiaire, Ramiro Marra, figure de la coalition ultralibérale La Libertad Avanza (« la liberté avance ») et candidat pour le poste de chef de gouvernement de la ville de Buenos Aires a insisté, dans un message publié sur X (ex-Twitter) : « Aujourd’hui plus que jamais : n’épargne pas en pesos. Prends soin de ton argent, il a été difficile à gagner. »
Une enquête ouverte
Le président Alberto Fernandez (centre gauche), qui n’est pas candidat à sa réélection et reste très effacé politiquement, a déposé une plainte contre Javier Milei, le 11 octobre, pour « intimidation publique » dans le but de « susciter la peur publique ». La plainte concerne aussi Ramiro Marra. Une enquête a été ouverte.
La veille, quatre associations bancaires argentines avaient, sans le citer, condamné les propos de Javier Milei. « Une démocratie forte a besoin d’institutions solides et de dirigeants politiques matures et responsables », avançait le communiqué. « Les candidats doivent éviter de faire des déclarations infondées qui provoquent de l’incertitude au sein de la population et la volatilité des variables financières », poursuivait le texte des entités bancaires.
Javier Milei a contre-attaqué, lors d’une conférence de presse, le 11 octobre. Il a refusé d’assumer toute responsabilité dans la dévaluation du peso. « Est-ce moi qui suis responsable du déficit budgétaire ? De l’émission monétaire ? De la dette ? », a-t-il déclaré, en énumérant différents phénomènes participant à la dévaluation et l’inflation. Cette dernière s’élève à 138 % sur un an, l’un des taux les plus élevés du monde.
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