Ils savent qu’une grande partie d’entre eux risquent de périr dans les combats à venir ou d’être grièvement blessés. A travers l’Ukraine, des dizaines de milliers d’hommes et de femmes ne s’en sont pas moins engagés cet hiver. Ils s’entraînent depuis avec acharnement pour participer à la reconquête des territoires de leur nation, envahis par la Russie depuis le 24 février 2022, voire depuis 2014 – date de l’annexion de la Crimée par Moscou et du début de la conquête du Donbass par des séparatistes, assistés par la Russie.
Cette reconquête, dans le cadre d’une vaste contre-offensive qui pourrait, en théorie, être lancée dans un futur proche, mais dont tous les détails sont secrets, est confrontée à la nécessité de résoudre un problème de ressources humaines. Il faut des combattants pour la guerre. Moins cruciale que celle des armes et munitions réclamées aux alliés occidentaux, la question reste un des pivots des événements militaires à venir.
Classé « secret », le nombre de pertes subies depuis quinze mois par les forces ukrainiennes est désormais estimé aux alentours de 100 000, chiffre comprenant une minorité de tués et une majorité de blessés incapables de reprendre les armes. « En théorie, pour réussir une offensive, il faut un rapport de trois contre un en faveur de l’attaquant, estime l’analyste militaire Oleksiy Melnyk, du centre de réflexion Razumkov. Mais, en réalité, il n’y a pas que les chiffres bruts qui comptent. De nombreux facteurs sont plus déterminants que le nombre d’hommes, de canons ou de blindés. »
Créer la surprise
Le niveau technologique, le moral des troupes et la capacité à surprendre l’adversaire peuvent revêtir plus d’importance que les simples données numériques sur les effectifs. « Il y aura des éléments de surprise [durant la contre-offensive] pour notre adversaire, souligne encore M. Melnyk. Il faut bien sûr ne pas répéter les méthodes précédemment utilisées lors des contre-offensives de Kharkiv et de Kherson [à l’automne 2022]. Je suis certain que des approches innovantes seront utilisées. »
« Notre ennemi va avoir de plus en plus de surprises », confirme le commandant de Viï, un escadron de reconnaissance qui revient de quatre mois d’entraînement au Royaume-Uni. L’homme, de grande stature, entouré de deux camarades également masqués et armés d’un fusil d’assaut, rencontré de manière fortuite dans une ville proche de la frontière russe, explique qu’il n’est pas autorisé à s’exprimer dans les médias. Créée au printemps 2023, l’unité Viï fait partie d’une galaxie d’autres unités dépendant, en toute discrétion, de la structure du commandement opérationnel nord.
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