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Réforme des retraites: Emmanuel Macron au défi d’une crise qui se durcit

Au lendemain de l’intervention d’Emmanuel Macron, la 9e journée de manifestation a été marquée par un net rebond de la mobilisation et une multiplication des heurts.

Il est arrivé à Bruxelles aussi discrètement que les syndicats se sont élancés bruyamment à Paris. Au lendemain de son intervention télévisée sur la réforme des retraites, le président de la République est arrivé en retard et a directement rejoint la séance plénière du sommet européen auquel il participe jusqu’à vendredi, sans passer par le traditionnel tapis rouge devant lequel la presse interpelle les chefs d’État. Il avait «des réunions» à l’Élysée a indiqué l’Élysée sans plus de détails.

Accusé d’avoir jeté «de l’huile sur le feu» lors de son intervention, il ne fallait pas en rajouter. La veille, le chef de l’État avait accusé les syndicats de ne pas avoir proposé de compromis lors de la réforme des retraites, mais il avait surtout évoqué la prise d’assaut du Capitole par les partisans de Donald Trump ainsi que l’invasion des lieux de pouvoir par les partisans de Jair Bolsonaro après leur défaite. À Bruxelles, il fallait donc éviter un «effet Leonarda» en offrant aux syndicats et aux manifestants une déclaration à contester dans la seconde au moment où les cortèges s’élançaient, remontés contre lui. Et beaucoup plus fournis que la semaine dernière. Selon la CGT, 800.000 personnes ont manifesté à Paris, 119 000 d’après Beauvau. En France, entre 1,089 et 3,5 millions de manifestants ont défilé. Des chiffres en nette hausse avec des records de mobilisation dans plusieurs villes de France. Parallèlement, les mouvements de grève se sont amplifiés dans la fonction publique, l’énergie et les transports. Et la jeunesse est entrée en scène avec des blocages de lycées et d’universités. Comme un point de bascule.

Car dans le même temps, la radicalisation tant redoutée par l’exécutif est advenue, malgré les appels au calme lancés en début de journée par les leaders syndicaux. Partout en France, les affrontements entre les forces de l’ordre et les casseurs se sont multipliés. Plus de 200 individus ont été interpellés, et 149 forces de l’ordre blessées. À Lorient, les manifestants ont même incendié la sous-préfecture et un commissariat. À Bordeaux, le porche de l’hôtel de ville a aussi été incendiée. «Comment s’étonner de ce déferlement de violences quand des leaders politiques ou syndicaux laissent entendre qu’un processus démocratique est antidémocratique, s’agace-t-on au sein de l’exécutif. Ce genre de déclarations ne peut que conduire à légitimer la violence.»

Faire monter la pression

Côté syndicats, on redoutait aussi ces débordements à cause de leur impact sur l’opinion. Depuis le début de la contestation, les centrales s’efforcent de contenir les violences en marge du mouvement social. «Jusqu’au bout il va falloir garder l’opinion» qui est une «pépite», espérait le patron de la CFDT, Laurent Berger, avant le départ de la manifestation parisienne. Mais du côté politique, il en va autrement. Notamment chez LFI, où Jean-Luc Mélenchon continue à attiser la colère. «Le soi-disant essoufflement du mouvement n’aura pas lieu, a assuré le leader des Insoumis. Les gens ne céderont pas, même si vous leur parlez avec autant d’arrogance, ils ne baisseront pas le nez.» Le matin, il avait invité chacun à «jeter toutes ses forces dans la bataille» contre la réforme des retraites, et à «ne pas se laisser intimider».

PODCAST -«Grande déglingue et malaise français»

Après cette neuvième journée de mobilisation, la contestation de la réforme des retraites entre dans une nouvelle phase. Celle où la violence fait désormais partie de l’équation. Jeudi soir, c’est d’ailleurs aux CRS et à la police que l’on s’adressait en priorité au sein de l’exécutif. «Il faut saluer les forces de l’ordre qui font tout ce qu’elles peuvent pour empêcher les black blocks de gâcher les manifestations», indiquait un conseiller. Gérald Darmanin a lui dénoncé les «casseurs qui veulent tuer des policiers», et la «bordélisation de l’ultra-gauche». Les syndicats le savent qui veulent encore faire monter la pression avant l’avis du Conseil constitutionnel sur la réforme attendu pour la semaine prochaine. Mais amplifier la mobilisation, c’est aussi prendre le risque de voir le mouvement leur échapper. Et devenir incontrôlable.

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309 commentaires
  • OlivierWa

    le

    Peut être serait il temps de faire une contre manifestation pour préserver nos retraites sans augmenter les impôts, et donc pour soutenir le passage à 64 ans!

  • MICHEL BOUCHARDY

    le

    Les Français ont perdu le Nord ! Alors que tous les pays Européens allongent logiquement et sans heurts , la durée de la vie active - jusqu'à 67 ans au Danemark avec un planning à 70 ans à l'étude - les Français se braquent sur un modeste report de 62 à 64 ans ! Cela relève du caprice, hors tout raisonnement......
    Si la rue est en effervescence à ce point c'est aussi la faute des députés qui n'ont pas eu le courage de voter la réforme , obligeant le gouvernement à utiliser le 49-3....La lâcheté démagogique des députés n'est pas à leur honneur !

  • breton29

    le

    Macron avait des portes de sorties : faire voter l'assemblé sur son texte ou appeler à un referendum. Mais il se comporte comme un enfant vaniteux qui veut montrer à 65 millions de français qu'il n'a pas de compte à leur rendre. Le comportement odieux de l'extreme gauche ne le sauvera pas.

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