Ce fut une journée cruciale pour l’Irlande du Nord et les relations entre le Royaume-Uni et l’Union européenne (UE), inscrite sous les auspices inhabituels de la royauté britannique. Lundi 27 février, depuis l’hôtel de ville de Windsor (dans le Berkshire), à un jet de pierre du vénérable château royal, le premier ministre britannique, Rishi Sunak, et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, tout sourire et visiblement complices, ont annoncé le « cadre de Windsor », une révision très substantielle du protocole nord-irlandais.
Négocié par Boris Johnson fin 2019, le protocole constituait une partie cruciale du traité du Brexit régissant le sort spécial réservé à l’Irlande du Nord, mais il était rejeté par les unionistes de la province (fidèles à l’appartenance au Royaume-Uni), qui le vivaient comme une atteinte à leur identité britannique parce qu’il instituait une frontière douanière en mer d’Irlande. Ce texte polluait depuis trois ans les relations entre Londres et Bruxelles.
Résultat de quatre mois d’intenses négociations, le cadre de Windsor « marque un tournant pour l’Irlande du Nord, il permet un commerce fluide avec le reste du pays, protège sa place dans l’union [britannique] et préserve la souveraineté des Nord-Irlandais », a assuré Rishi Sunak. L’accord « ouvre un nouveau chapitre, pour des relations plus fortes entre l’UE et le Royaume-Uni », a ajouté Ursula von der Leyen, avant de se rendre au château de Windsor où elle a été reçue par le roi Charles III. « Le roi n’est pas impliqué dans les discussions sur le protocole », a assuré la Commission européenne, mais la rencontre a été interprétée par les médias britanniques comme une approbation royale de l’accord et a suscité des interrogations, le monarque étant supposé rester neutre politiquement.
Allègement des contrôles douaniers
Jamais complètement entré en vigueur, le protocole de 2019 imposait de contraignantes déclarations en douane pour les biens transitant du Royaume-Uni vers l’Irlande du Nord, cette dernière restant après le Brexit dans le marché intérieur européen pour les biens. Le but était d’éviter l’apparition d’une frontière avec la République d’Irlande, qui aurait menacé l’équilibre fragile accord du Vendredi saint. Cet accord de paix a mis fin en 1998 à trente ans de guerre civile en Irlande du Nord entre les unionistes et les nationalistes, partisans d’une réunification de l’île.
Le cadre de Windsor allège drastiquement les contrôles douaniers sur les biens destinés uniquement au marché nord-irlandais et commercialisés par des acteurs de « confiance ». Sur les produits sanitaires et phytosanitaires, ils seront ramenés à 5 % de ce qui était initialement envisagé. Seules les marchandises dont la destination finale est la République d’Irlande – à l’intérieur, donc, du marché unique européen – seront soumises à des contrôles significatifs.
Il vous reste 64.12% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.