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Présidence LR : immigration, retraites, éoliennes, Sarkozy... Ce qu'il faut retenir du débat entre les candidats

Éric Ciotti (g), Bruno Retailleau (c) et Aurélien Pradié (d).
Éric Ciotti (g), Bruno Retailleau (c) et Aurélien Pradié (d). CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP

À quinze jours du premier tour pour l'élection du patron du parti, Éric Ciotti, Aurélien Pradié et Bruno Retailleau se sont retrouvés sur le plateau de LCI.

Tous y voient un enjeu en vue de 2027. «Montrer une alternative crédible de droite courageuse sans tabou» selon Éric Ciotti ; «trancher une ligne politique claire» pour Bruno Retailleau ; «organiser la relève et faire preuve d'audace» pour Aurélien Pradié. Lundi soir, sur LCI, les trois candidats à la présidence des Républicains avaient une heure et demie pour tenter de s'imposer et de convaincre les quelque 91.000 adhérents que compte désormais le parti. Le tout, en présence de leurs soutiens installés dans le public, au côté de leur patronne par intérim, Annie Genevard.

Des introductions sous le signe du rassemblement des cadres et des électeurs

Après tirage au sort, Bruno Retailleau a été le premier à commencer, non pas face à «des adversaires» mais des « compétiteurs». «Des amis», dira même Aurélien Pradié. Le ton est donné, pas question d'étaler les divisions internes à LR sur la scène publique ni de multiplier «les coups de menton», ajoute le député LR du Lot. Peu de différences, donc. Aussi bien sur le fond - avec une totale opposition à la politique d'Emmanuel Macron ; que sur la forme - les trois candidats portent le même costume bleu, avec cravate bleue sur chemises blanches. «Nous sommes dans la même famille», sourit Éric Ciotti, très à l'aise tout au long du débat, sans notes devant lui. «Notre famille politique est trop affaiblie pour se payer le luxe qu'on se divise, abonde Bruno Retailleau. Je veux rassembler sur une ligne claire parce qu'on le voit bien, notre famille a perdu près de 10 millions d'électeurs en une quinzaine d'années. On les a déçus. On a aussi trahi certaines de nos promesses et c'est ce que je veux changer absolument». Et le sénateur de rappeler sa volonté de défendre «le niveau de vie (des Français), les conditions matérielles de l'existence, mais aussi leur mode de vie. Tous ces petits signes de la culture de notre civilisation qui font finalement le sel de la vie».

«Le moment est venu d'oser la droite!», poursuit Éric Ciotti. «Je ne me résous pas à ce que certains publient déjà l'avis de décès des Républicains parce que ça signifierait quoi? Qu'après le désastre de la gestion macronienne, il ne resterait plus qu'une alternative entre Monsieur Mélenchon et Madame Le Pen. Notre famille politique doit occuper toute sa place. Elle doit le faire à droite. Moi, j'ai le cœur à droite. Les Français attendent des valeurs de droite depuis trop longtemps» appuie l'élu des Alpes-Maritimes.

«Il nous faut un combattant», fait valoir de son côté le benjamin de la compétition, Aurélien Pradié, le «seul à avoir été maire» (de Labastide-Murat puis de Cœur de Causse, ndlr). «Je suis aussi le seul des candidats à avoir arraché à la gauche ma circonscription. J'ai été élu député du Lot contre toute attente (en 2017), réélu très largement (en 2022)», explique-t-il, en disant vouloir porter «un nouvel espoir». «C'est le sens de ma candidature. Porter pour nous, pour la France, pour nos militants, un nouvel espoir», martèle Aurélien Pradié, en l'indiquant clairement : les électeurs de droite attendent «que nous agissions, pas seulement que nous parlions».

Demande de fermeté sur le régalien, en particulier en matière d'immigration

Ukraine, Ocean Viking , immigration, titres de séjour... Après leurs introductions, les candidats embraient sur les sujets régaliens. Avec un objectif : «le retour de la souveraineté, la France (ayant) organisé sa propre impuissance», selon Bruno Retailleau. Éric Ciotti acquiesce. Pas question, donc, de voter un texte gouvernemental sur l'immigration qui amènerait à des régularisations massives. «Je dis très clairement : aucun droit pour les clandestins, ni logement, ni allocations, ni école. C'est un délit de rentrer illégalement sur le territoire national», détaille le député du Sud-Est en ramassant son projet dans une formule : «la prison et l'avion». «Moi je parle aux Français !», répond-il encore lorsqu'il lui est demandé s'il se rapproche des propositions du RN. «Moi je vois une invasion migratoire», ajoute-t-il. Dès lors, Éric Ciotti entend répondre sans «tabous» ni « politiquement correct» : «On réagit avec autorité pour rétablir l'ordre et pour que les Français décident, qui veulent accueillir et qui ils ne veulent pas accueillir. C'est ça la souveraineté. C'est ça la liberté».

«L'ambition de la droite républicaine c'est de reparler au peuple», reprend Aurélien Pradié, qui refuse «la droite des colloques». «Nos concitoyens sont préoccupés - et c'est le moins qu'on puisse dire - par la question migratoire. Est-ce qu’aujourd'hui notre pays réussit le défi de l'assimilation des uns et des autres? La réponse est non et ce serait irresponsable que la droite républicaine ne cherche pas à régler ce problème», tranche le député du Lot, qui veut diviser les chiffres de l'immigration par deux. «Tous les titres de séjour dans notre pays doivent être probatoires», poursuit Aurélien Pradié. «Nous devons réduire drastiquement l'immigration étudiante. Nous avons aujourd'hui des filières entières pour lesquelles nous n'avons aucun débouché, sur lesquels nous continuons à accueillir des étrangers. Il faut y mettre un stop», fait-il encore valoir en opposant une fermeté sur les sujets régaliens quand certains élus LR le taxaient au début de la campagne de tomber dans l'angélisme.

Pas question, non plus, «de tomber dans les leçons de morale» vis-à-vis des électeurs du RN, un parti «utilisé pendant des années par la gauche pour tétaniser, intimider la droite et lui interdire ce débat», affirme Bruno Retailleau. «Je ne tombe pas dans ce panneau», explique-t-il, disant considérer que «ce n'était pas raciste de vouloir faire retourner les clandestins chez eux», principe «au contraire profondément républicain.» Dans ce contexte, la droite doit «porter un projet de civilisation» pour répondre aux inquiétudes des Français. Parmi lesquelles figurent la poussée de l'islam radical, politique, et prosélyte. «Nous sommes tous d'accord pour dire que la présence du voile est aujourd'hui une attaque en règle contre la République», tranche Aurélien Pradié favorable à l'interdiction de ce vêtement dans l'espace public, et partisan de l'uniforme... y compris à l'université. Proposition qui ne convainc pas Bruno Retailleau.

Au bout de trois quarts d'heure d'échange, les premières différences s'expriment sur le dossier des retraites et la question de l'âge légal de départ. Éric Ciotti et Bruno Retailleau indiquent qu'ils pourraient voter la réforme d'Emmanuel Macron car ils ne sont «pas des girouettes», comme l'indique le sénateur, soulignant la «cohérence (et) la constance» de son camp. «La droite populaire que je veux incarner, ce n'est pas une punition», rétorque Aurélien Pradié. Manière de viser, sans les nommer, ses deux opposants de la compétition. «Je souhaite que nous ayons une réforme juste. Cette réforme, c'est celle qui consiste à dire une chose simple : celui qui a commencé à travailler tôt, finit tôt, précise Aurélien Pradié. Je ne ferai pas la courte échelle à Emmanuel Macron sur la réforme des retraites au moment où nous voulons clarifier nos positions politiques. C'est peut-être le moment de ne pas servir la soupe à Emmanuel Macron».

Retraites : Éric Ciotti propose un «choix» entre l'âge de départ et la durée de cotisation

« Avec le souci du rassemblement qui me caractérise, s'amuse Éric Ciotti - conscient que beaucoup lui reprochent à LR d'être trop clivant -, je vais essayer de faire la synthèse entre Bruno Retailleau et Aurélien Pradié !». Le candidat compte bien dire la vérité : «Si on veut sauver le système de retraites et protéger nos retraités, il faut cotiser plus» et «travailler deux à trois ans de plus». Avec aussi «un système à la carte» pour «ceux qui ont commencé très tôt et qu'on ne va pas contraindre d'aller jusqu'à 65 ans».

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Le développement de l'éolien maritime ou terrestre largement désapprouvé

Après les retraites, les éoliennes ont été le deuxième sujet de divergences. «Je regrette le vote des sénateurs», fustige d'entrée Éric Ciotti, en revenant sur la récente adoption d'un texte de loi gouvernemental sur les énergies renouvelables par la Chambre Haute, pourtant à majorité de droite. «Je le dis parce qu'il y avait deux mesures qu'on réclamait. C'était un droit de veto des maires (sur l'éolien), et (le fait) qu'on n'installe aucune éolienne en mer à moins de 40 kilomètres des côtes», a regretté Éric Ciotti, estimant qu'«on est en train de massacrer nos paysages».

«Les choses sont claires le Sénat n'aurait pas dû céder. Vous n'auriez pas dû (...), approuve Aurélien Pradié, en ciblant notamment Bruno Retailleau. Nous devons dire un stop immédiat au développement de l'éolien. C'est un non-sens économique». «Qu'est-ce qu'on a fait au Sénat?, s'est défendu Bruno Retailleau, pris pour cible par ses deux concurrents. On a donné la possibilité aux maires, dans des documents d'urbanisme, d'interdire des zones. C'est tout ce qu'on a pu faire parce qu'il fallait qu'on ait une majorité et je le regrette. Mais 150 sénateurs à peine, ça ne fait pas la maille quand on est 348 ! Eh bien, on a voté, mon cher Éric, je me suis opposé. Tu regarderas d'ailleurs les votes», a poursuivi le patron des sénateurs LR. «Les choses ont été claires et enfin, on a obtenu qu'on puisse écarter à dix kilomètres les éoliennes dès lors qu'il y a un site naturel remarquable ou un monument historique», se défend encore Bruno Retailleau. «Moi, je crois au défi climatique à relever pour les générations à venir. Mais notre responsabilité, c'est d'y répondre intelligemment et pas d'y répondre avec le fouet», tranche Éric Ciotti.

Trouver un chemin de crête entre conservatisme et modernité

Faut-il inscrire le droit à l'interruption volontaire de grossesse (IVG) dans la Constitution, comme le préconisent les macronistes de Renaissance ainsi que les Insoumis ? «Non, je ne suis pas d'accord», répond clairement Bruno Retailleau. «La première chose, c'est parce que personne ne conteste la loi Veil. En France, il n'y a pas un parti, une majorité, un gouvernement qui le conteste. Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a pratiquement constitutionnalisé justement ce droit pour les femmes de recourir à l'avortement. (...) Moi je suis Français, je ne suis pas américain, et c'est un débat que l'extrême gauche est en train d'importer des États-Unis». «Nous n'avons aucun inconvénient à inscrire les principes de la loi Veil dans la Constitution seulement les principes, ni plus ni moins», plaide de son côté Éric Ciotti qui croit «à une droite de conquête des droits». «La droite ne peut pas être ringarde. Elle doit être en phase aussi avec la société», poursuit-il, sans préciser s'il vise quelqu'un en particulier avec cette attaque. À commencer par Bruno Retailleau, souvent présenté comme le plus conservateur des trois candidats. «Non», balaie Éric Ciotti, qui «souhaite qu'on conserve le meilleur du passé, de nos racines, bien sûr, de nos civilisations, mais qu'on regarde aussi l'avenir, l'espérance, comment notre société évolue, comment les jeunes aussi veulent évoluer». «C'est toujours une mauvaise chose que la droite reprenne des mots de la gauche pour culpabiliser justement la droite, rétorque Bruno Retailleau, selon qui il ne s'agit pas de remettre en cause la loi Veil. La loi Veil, elle existe et elle n'est pas menacée.»

«Oui, c'est toujours une mauvaise chose quand la droite abandonne à l'extrême gauche ses combats historiques, rebondit Aurélien Pradié, visiblement d'accord avec Éric Ciotti. Oui, Simone Veil, c'est notre combat, c'est notre histoire. Et oui, je souhaite demain que cette droite-là, qui ne parle plus à personne, elle puisse reparler aux Français et aux Français. (...)Je ne veux pas que la droite reproduise toujours les mêmes erreurs. Soyons demain une droite de conquérants.»

Trois nuances de prise de distance avec Nicolas Sarkozy pour reconstruire la droite

«La politique ce sont des convictions (...) Pas question d'être la béquille des Macron. Pas question non plus d'être le marchepied de Marine Le Pen», insiste Bruno Retailleau, affirmant que «la marque [des Républicains] est morte. Il faut rebâtir tout, du sol au plafond. Il faut proposer quelque chose de nouveau. Il faudra changer de nom». Bruno Retailleau assume «cette rupture avec Nicolas Sarkozy parce qu'il a soutenu (Emmanuel) Macron à l'élection présidentielle. Et (qu')il est pour une coalition avec Emmanuel Macron. Si ceux qui veulent aller avec M. Macron souhaitent vraiment y aller, il y a un parti, c'est En marche!». «L'objectif, c'est que l'on gagne l'élection présidentielle de 2027. C'est en 2027 que l'on verra si on est mort ou pas, développe Éric Ciotti, lui aussi favorable à une ligne d'indépendance face à l'exécutif. «Aujourd'hui on bouge encore et on a des forces, des convictions, des territoires, des militants et on doit remercier nos militants qui sont toujours là. Et je leur dis tous les soirs. Merci d'être encore là», explique Éric Ciotti, lui aussi «en désaccord avec ce que Nicolas Sarkozy prône» à savoir une alliance avec Emmanuel Macron. «Pas question d'être la béquille de Macron, complète Bruno Retailleau. Pas question non plus d'être le marchepied de Marine Le Pen».

«Il faut tourner la page de Nicolas Sarkozy», enchaîne Aurélien Pradié. «Je suis le seul à pouvoir vraiment le faire parce que je n'ai été ni un adversaire historique de Nicolas Sarkozy ni lieutenant de Nicolas Sarkozy», plaide-t-il. Façon de renvoyer dos à dos Bruno Retailleau et Éric Ciotti, qui étaient tous les deux déjà impliqués dans la vie politique de la droite lorsque l'ancien chef de l'État était aux affaires. «Et je pense que nous sommes à un moment où nous devons couper les ponts avec lui, le faire avec respect. Il ne s'agit pas de régler ses comptes. Il ne s'agit pas de l'insulter. Il a été un grand président de la République. (...) Simplement on passe à autre chose», complète-t-il. Un avenir qui s'appelle Laurent Wauquiez selon Éric Ciotti. Trop tôt, juge Bruno Retailleau, au risque, estime-t-il, d'affaiblir le futur candidat et surtout de ne pas avancer sur le travail d'idées indispensable à la reconstruction de la droite. «Laurent Wauquiez a toutes les qualités demain pour être notre candidat (...), indique Bruno Retailleau. On va mettre l'ego, les ego avant les idées. On a un énorme travail de reconstruction à faire, et ensuite (viendra) l'incarnation.» Encore faudra-t-il se mettre d'accord sur le calendrier et le mode de désignation du candidat à la présidentielle.


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236 commentaires
  • Robt45

    le

    Ciotti n'est pas à la hauteur.

  • 3570561 (profil non modéré)

    le

    Ensuite le sujet de l'avortement et effectivement ce sont les lois de Simone Veil et elles s'appliquent sur le territoire national comme l'a rappelé Bruno Retailleau à la différence des Etats Unis qui sont un système fédéral.

  • 3570561 (profil non modéré)

    le

    Et pour finir , je pense que Ruth Elkrief mérite une réponse à sa question quelle différence y a t il entre la droite LR et RN ? La réponse est que le débat sur la peine de mort a été enterré par Jacques Chirac donc le RPR avec l'article 66-1 de la Constitution.

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