L’histoire remonte au Ve siècle avant notre ère, aux temps héroïques de la République romaine, et elle a été embellie par les historiens latins jusqu’à la légende, si bien que nul ne peut savoir sur quels faits historiques elle se fonde exactement. Arrivé au soir de sa vie, le patricien Lucius Quinctius Cincinnatus, ancien consul, s’est retiré sur ses terres. Mais la ville étant traversée par de violentes tensions sociales et devant subir les attaques des Eques et des Sabins, les sénateurs viennent le tirer de sa retraite et lui demandent d’abandonner sa charrue pour sauver la République, en acceptant d’occuper la fonction de dictateur. Seize jours plus tard, une fois les ennemis vaincus et la concorde rétablie, le vieil homme abandonne le pouvoir et retourne cultiver son champ.
Sans doute l’histoire est-elle trop belle pour être vraie, et ne doit pas être prise au pied de la lettre. Mais la figure de Cincinnatus (et l’archétype de modestie et de désintéressement qu’il représente) subsiste comme l’une des nombreuses références antiques qui parsèment la vie politique italienne, un peu à la manière de la « traversée du désert » dans les mythologies politiques françaises.
Y a-t-il eu quelque chose du souvenir de Cincinnatus dans la démarche du président Sergio Mattarella lorsqu’il a appelé, dans la soirée du 2 février, l’ancien gouverneur de la Banque d’Italie, Mario Draghi, afin de lui proposer de former le prochain gouvernement italien, en pleine pandémie et tandis que la crise politique provoquée par la démission de Giuseppe Conte prenait un tour inextricable ?
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