Le résultat a dépassé les plus folles espérances des manifestants qui dénoncent, depuis un an déjà, les inégalités sociales au Chili. Dimanche 25 octobre, 78 % des votants se sont prononcés en faveur d’une nouvelle Constitution. Le pays va donc en finir avec le texte actuel, qui avait été adopté en 1980 sous la dictature du général Augusto Pinochet (1973-1990) et qui a été le premier au monde à refléter les théories néolibérales.
« C’est merveilleux, je n’en reviens pas », lâche Natalia Gainza, 37 ans, encore abasourdie par cette journée historique. Comme tout son entourage, cette sociologue a voté pour la rédaction d’un nouveau texte, dans l’espoir « que les choses changent enfin : que tous les Chiliens puissent avoir accès à une éducation gratuite et de qualité, pareil pour la santé ». Au Chili, l’accès aux services comme la santé, l’éducation et les retraites dépend bien souvent du pouvoir d’achat des usagers.
« Aujourd’hui, la citoyenneté et la démocratie ont gagné (…). C’est un triomphe pour tous les Chiliens et les Chiliennes qui aiment la démocratie, l’unité et la paix », a déclaré le président de droite, Sebastian Piñera, dont la gestion est vivement critiquée par les manifestants depuis le début du mouvement social. « Jusqu’ici, la Constitution nous a divisés. A partir de maintenant, nous devons tous collaborer pour que la nouvelle Constitution soit un grand cadre d’unité, de stabilité et d’avenir. »
Rejet de la classe politique
Le vote s’est déroulé dans le calme et a été marqué par une participation de 50,8 %, un record depuis la fin du vote obligatoire dans le pays, en 2012. Dans la soirée, des milliers de partisans du « Apruebo » (« J’approuve ») se sont rassemblés plaza Italia, à Santiago, pour fêter les résultats du référendum. Les quelque 14,8 millions d’électeurs étaient également appelés à se prononcer sur l’organe chargé de rédiger la nouvelle Constitution. 79 % des votants ont voté pour une « Convention constituante », composée de représentants élus spécialement pour l’occasion – l’autre option, la « Convention mixte », devait être composée pour moitié de parlementaires déjà en poste.
« Ce vote massif pour une Convention constituante illustre bien l’immense rejet de la classe politique par les Chiliens », souligne Sylvia Eyzaguirre, chercheuse au Centre d’études publiques du Chili (CEP), qui estime que « l’un des grands défis des mois à venir sera d’élire des représentants qui aient davantage de légitimité auprès de la société ». Ce scrutin aura lieu le 11 avril 2021 : au total, 155 personnes seront désignées par les Chiliens. « C’est la première fois dans l’histoire du pays que nous allons avoir l’occasion de définir notre Constitution. Enfin, nous allons voir se refléter dans un texte la “morale du peuple” ! », se réjouit Ivan Cornejo, graphiste de 37 ans et compagnon de Natalia Gainza.
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