La banderole déployée devant les grilles du bâtiment scolaire donne le ton : « Enseignants de Prévert menacés, collège fermé. » Dans cet établissement de Noisy-le-Grand (Seine-Saint-Denis), les cours n’ont repris que ce mardi 3 novembre au matin. Les enseignants étaient pourtant bien présents la veille, lundi, dans leur établissement, mais pour « faire corps » avec l’une de leurs collègues, menacée par l’un de ses anciens élèves. « On s’est réunis en “AG” [assemblée générale] pour réfléchir à la façon de se protéger collectivement et à la manière de sécuriser cette rentrée », explique une membre de l’équipe enseignante qui a requis l’anonymat.
Car aucun d’eux ne se sent « tout à fait rassuré », rapporte-t-elle. C’est pour cela qu’ils ont invoqué leur droit de retrait, lundi, et ont différé de vingt-quatre heures l’accueil de leurs 700 élèves, ainsi que l’hommage à Samuel Paty, l’enseignant assassiné le 16 octobre.
Comme lui, la professeure menacée enseigne l’histoire et la géographie en collège. Comme lui, elle se retrouve aux prises avec des « allégations d’adolescents » dans lesquelles elle dit ne « mettre aucun sens ». Comme lui, elle a porté plainte auprès de la police, épaulée par sa chef d’établissement.
Des insultes, un ton menaçant
« J’espère que la comparaison s’arrêtera là », confie-t-elle, sous couvert d’anonymat. Enseignante depuis treize ans – dont huit à Jacques-Prévert –, elle parle avec émotion du téléphone qui a sonné, dans la nuit de samedi à dimanche, peu après 1 heure du matin. De cet appel sur son portable qu’elle n’a pas pris. Du message écouté dimanche peu après 7 h 45 (« Je m’étais levée tôt pour peaufiner la rentrée ») et qui l’a « pétrifiée ». « Sale pute », « On va t’attraper au collège », « Tu nous retrouveras pas »… Des bribes de phrases, deux voix de garçons, des insultes, un ton menaçant.
Aucune revendication, aucune référence aux attentats. « Mais dans le contexte sécuritaire qu’on connaît, j’ai préféré contacter immédiatement mes collègues », dit-elle. La principale du collège vient la récupérer peu après 9 heures, direction le commissariat.
Là, l’officier de police l’interroge sur ses relations avec ses élèves (« elles n’ont jamais été conflictuelles », assure l’enseignante). Il lui demande si elle a fait cours sur la laïcité (« en demi-groupe, deux à trois semaines avant les vacances, avec mes 3e ») ; si elle a connu des incidents au collège (« ce n’est pas le cas, ni avec des élèves ni avec des parents »). « Cet officier nous a expliqué que les établissements scolaires faisaient l’objet d’une surveillance particulière », rapporte-t-elle.
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